Avant son lancement le 30 septembre 2025, de nombreux spécialistes de l’automobile, les constructeurs en premier lieu, prévoyaient une fin rapide de la seconde édition du leasing social. Près d’un mois plus tard, le dispositif est encore loin d’avoir épuisé son enveloppe. Et les 50 000 dossiers prévus dans le cadre du dispositif des CEE (Certificats d’économie d’énergie) ne sont toujours pas écoulés.
“En une journée, 18 000 commandes ont été atteintes, mais après, ça s’est tassé assez vite. Aujourd’hui, force est de constater que le nombre de commandes a atteint une vitesse de croisière, constate Marc Bruschet, président de la branche distribution de Mobilians. Nous avons péniblement atteint les 40 000 commandes sur la plateforme de l’Agence de Service et de Paiement (ASP) à la fin de la semaine du 20 au 26 octobre 2025“, ajoute-t-il. Désormais, les distributeurs dénombrent près de 300 dossiers validés par jour.
Un leasing social 2025 moins avantageux
Plusieurs raisons expliquent ce ralentissement. Tout d’abord, les loyers proposés sont bien plus élevés, comme l’explique Philippe Fournier, président du groupement des concessionnaires Hyundai. “Nous parlons de ménages aux revenus modestes, qui ont parfois du mal à mettre 140 euros par mois et peinent à avancer en matière de financement“, assure Philippe Fournier. Et avec le coût de la borne de recharge, le dispositif est nettement moins accessible pour les ménages les plus modestes.
Les constructeurs qui s’étaient lancés dans une course au loyer le plus bas en 2024 – avec par exemple une Fiat 500 à 49 euros par mois – ont été rattrapés par la réalité économique et les pertes futures des valeurs résiduelles. Jean-Philippe Imparato, alors patron de Stellantis Europe déclarait à l’automne 2024 : “On a fait croire qu’une voiture neuve coûtait 49 euros par mois, c’est totalement faux, et c’est le buy-back qui paye.“
De plus, concernant les critères d’éligibilité, les conditions administratives sont également complexes. De nombreux candidats découvrent, parfois trop tard, qu’ils ne remplissent pas les critères de distance domicile-travail. Certains déclarent en effet parcourir 15 km par jour, mais une fois les calculs précis réalisés sur les sites officiels, nombreux sont ceux qui se rendent compte qu’ils ne sont plus éligibles. D’autant que le système est draconien : si le client roule 14,8 km, le dossier ne passe pas !
Les distributeurs automobiles constatent également aussi que des clients ouvrent des dossiers auprès de plusieurs marques.” Des automobilistes ont ouvert six ou sept dossiers auprès de différents constructeurs. Fatalement, ça vient diluer l’impact du dispositif. C’est pour cette raison qu’il y avait de forts signes d’intérêt du côté des marques avant le top départ du 30 septembre 2025“, souligne un distributeur Hyundai de l’Essonne et de l’Yonne.
Moins de demandes en voitures électriques
Au-delà de l’aspect pratique, le ralentissement des validations de dossiers reflète aussi un affaiblissement global de la demande de voitures électriques. “Les concessionnaires font leur boulot de façon rigoureuse, comme lors de la première édition du leasing social. Nous ne présentons pas les dossiers si le client ne correspond pas aux critères. Ce n’est donc pas une question de dossiers retoqués“, tient à préciser Marc Bruschet.
Pour ce dernier, si l’enveloppe n’a pas été bouclée, le problème est davantage à imputer à la faiblesse de la demande dans les catégories sociales ciblées par le dispositif.
“Nous n’avons absolument pas retenu les leçons du premier leasing social. En matière de décarbonation du parc, ça ne sert strictement à rien : c’est juste un effet d’aubaine pour les classes moyennes et moyennes supérieures, des ménages déjà multimotorisés. L’État a baissé le montant de la prime de 13 000 à 7 000 euros, mais en même temps, il a relevé le revenu fiscal de référence, passé de 15 400 euros à 16 300 euros par part. S’agissant des ménages, nous avons atteint un plafond de verre : sur les deux dernières années, ils sont déjà équipés, et les consommateurs n’en veulent plus“, remarque le président des concessionnaires de Mobilians.
Sur les neuf premiers mois de l’année, Marc Bruschet constate qu’en termes de volumes d’immatriculations de BEV, les chiffres sont au même niveau qu’en 2022, avec 30 000 ventes de moins qu’en 2023. les professionnels constatent qu’en 2024, sur une année pleine, il s’est immatriculé près de 181 000 véhicules à batterie – dont les 50 000 véhicules du leasing social – contre 186 000 en 2023.
“La blague du leasing social a coûté au contribuable 650 millions d’euros. La deuxième version du leasing social va coûter entre 350 et 369 millions d’euros, et nous serons loin d’atteindre le volume de 2023 ou 2024 sur une année pleine”, s’agace Marc Bruschet.
Pour les distributeurs contactés, le leasing social est avant tout un effet d’annonce et un totem idéologique qui ne règle pas la question de la baisse des émissions de CO₂. Ainsi, pour Mobilians, il serait plus pertinent de s’attaquer au parc roulant vieillissant par le biais d’une prime à la conversion.
Automobile Magazine-France






































































































